Le Marché de Kingasani : quand Kinshasa retrouve ses racines rurales
Introduction
À l’est de Kinshasa, dans la commune de Kimbanseke, s’étend un marché aussi vaste qu’intrigant : le Marché de Kingasani.
Ici, la ville et la campagne s’embrassent. Les cris des vendeurs se mêlent au chant des coqs, les taxis klaxonnent entre les étals de manioc, et les mamans discutent en lingala, un panier de légumes sur la tête.
Le marché de Kingasani n’est pas seulement un lieu de commerce : c’est un trait d’union entre le Kinshasa urbain et les racines agricoles du Grand Bandundu.
Il incarne ce que la capitale a de plus vivant, de plus vrai, de plus nourricier.
📍 Adresse / Quartier : Avenue Kingasani, Quartier 1, Commune de Masina
🏙️ Province : Ville-province de Kinshasa
🌐 Site : www.mesejours.com
1. Le marché, poumon économique de Masina
Masina est l’une des communes les plus peuplées de Kinshasa.
Chaque jour, des milliers d’habitants s’y pressent pour acheter ou vendre de quoi nourrir leur foyer.
Au cœur de cette effervescence, le Marché de Kingasani joue un rôle vital : il alimente non seulement Kimbanseke, mais aussi Ndjili, Masina et même certaines zones de Limete.
Dès l’aube, des camions venus du Kongo Central, du Grand Bandundu ou du Plateau des Bateke déversent leurs cargaisons : sacs de manioc, régimes de bananes, paniers de tomates, maïs grillé.
Tout est là, brut, frais, coloré.
Kingasani, c’est le ventre du Kinshasa populaire.
2. Une ambiance unique : entre village et métropole
Le marché de Kingasani conserve une âme rurale, malgré sa taille et son activité urbaine.
Le sol reste souvent en terre battue, les étals sont faits de bois et de bâches, et l’air sent le mélange du charbon, du poisson fumé et du manioc fraîchement râpé.
Les commerçants s’interpellent, se taquinent, s’entraident.
On y retrouve cette convivialité congolaise rare dans les grands marchés de la capitale :
“Tata, tika ngai na defa mwa liboke, nazui nanu ba client te !”
(“Papa, laisse-moi t’emprunter un liboke, je n’ai pas encore eu de clients !”)
L’humour et la solidarité remplacent souvent les règlements écrits.
3. Un marché qui vit au rythme des saisons
Ce qui distingue Kingasani, c’est sa connexion directe avec la terre.
Ici, tout dépend des récoltes.
Pendant la saison des pluies, le marché déborde de produits frais :
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feuilles de manioc,
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maïs tendre,
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patates douces,
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haricots verts,
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arachides.
En saison sèche, ce sont plutôt les produits de conservation :
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manioc séché,
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poisson salé,
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légumes séchés,
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charbon et bois de chauffe.
Les prix fluctuent selon les pluies, les routes et l’état des récoltes.
Le marché vit littéralement au rythme du sol.
4. Les “mamans de Kingasani” : gardiennes du savoir-faire paysan
Au cœur de Kingasani, ce sont encore une fois les femmes qui tiennent les rênes.
Elles viennent tôt, souvent à pied, parfois de très loin.
Elles connaissent chaque client, chaque fournisseur, chaque saison.
Ce sont des expertes en négociation, mais aussi en logistique :
elles gèrent le transport des produits, les taxes, la conservation et les clients fidèles.
Dans leur regard brille une fierté tranquille — celle de nourrir Kinshasa.
Elles incarnent la continuité entre le monde rural et urbain, entre tradition et modernité.
5. Un lieu d’échanges culturels et linguistiques
Le Marché de Kingasani est un carrefour linguistique :
on y parle lingala, kikongo, tshiluba, swahili et parfois même français.
Les produits agricoles venant du Kongo Central, du Bandundu, du Katanga ou du Kasaï se côtoient dans un même espace.
Ce brassage fait de Kingasani une mini-RDC à ciel ouvert.
Chaque accent, chaque aliment raconte une histoire :
celle d’un voyage, d’un terroir, d’une famille.
6. Ce qu’on trouve à Kingasani
Voici un aperçu des richesses du marché :
🥬 Produits agricoles
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Manioc, maïs, haricots, riz, ignames, arachides.
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Légumes-feuilles : fumbwa, pondu, bitekuteku, ngai-ngai.
🐟 Produits de la mer et du fleuve
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Poissons du fleuve Congo ( chinchard,capitaine, tilapia, malangwa).
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Poissons fumés et séchés, très prisés pour la sauce.
🍗 Produits carnés et volailles locales
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Poulets du village, chèvre braisée, viande de brousse (rare mais recherchée).
🍌 Fruits et douceurs
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Mangues, oranges, papayes, ananas, makemba (bananes plantain).
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Jus artisanaux à base de gingembre et citron (Tangawisi).
🧵 Autres produits
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Vêtements d’occasion (friperie), sandales locales, charbon de bois, ustensiles de cuisine.
7. Un microcosme de la société kinoise
Kingasani reflète les contrastes et la vitalité du peuple congolais.
On y croise :
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les vendeurs ambulants de recharges téléphoniques,
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les apprentis mécaniciens,
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les mamans qui négocient au centime près,
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les jeunes qui transportent les marchandises sur des pousse-pousse,
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les enfants qui courent entre les étals en riant.
Chaque visage, chaque cri, chaque rire compose la mosaïque humaine de Kinshasa.
8. Les défis du quotidien
Le marché de Kingasani n’est pas épargné par les difficultés :
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routes dégradées,
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absence de système d’assainissement,
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insécurité nocturne,
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taxes informelles.
Mais face à ces obstacles, la communauté s’organise.
Des associations de vendeurs ont mis en place des brigades de nettoyage et des cotisations solidaires.
C’est une économie de survie, mais aussi de dignité.
9. Un lieu de découvertes pour le visiteur curieux
Pour le voyageur en quête d’authenticité, Kingasani est un passage obligé.
C’est un lieu d’observation fascinant, loin du Kinshasa officiel.
💡 Conseils pratiques :
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Y aller tôt le matin (entre 6h et 9h) pour profiter de l’ambiance matinale.
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Éviter les heures de grande affluence (midi – 14h).
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Prendre un guide local ou un habitant du quartier pour une immersion sans stress.
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Goûter aux bananes frites au piment, vendues à l’entrée principale du marché.
10. Le symbole d’un Kinshasa qui nourrit et résiste
Le Marché de Kingasani rappelle que Kinshasa ne vit pas que de musique ou de politique.
Elle vit aussi de ses marchés, de la terre, des mains calleuses qui nourrissent des millions de personnes chaque jour.
Kingasani, c’est le courage silencieux des petits producteurs,
la générosité des vendeuses,
et la mémoire vivante d’un Congo qui continue à se relever, chaque matin, avec le sourire.
Conclusion
Le Marché de Kingasani n’est pas un simple lieu d’achat : c’est une expérience, une leçon de vie, une fenêtre ouverte sur le Congo profond.
Il nous rappelle que derrière chaque repas servi à Kinshasa, il y a des visages, des trajets, des sacrifices.
Visiter Kingasani, c’est renouer avec la vraie saveur du pays, celle qui vient de la terre et du peuple.
